Depuis 1557
Situé à l’entrée du village médiéval d’Yvoire, au bord du lac Léman, le restaurant de la Vieille Porte vous accueille à l’intérieur de ses vieux murs ou sur sa terrasse à la belle saison. Notre maison formait une tour d’angle de défense jouxtant la « tour-porte » dite de Rovorée. Nous en sommes propriétaires depuis 1587 ; c’est sans doute le plus vieux débit de boissons d’Yvoire comme en témoignent les licences de cabaretier et le livre de comptes en notre possession.
Depuis 1991
Nous avons fêté en 2012 les 20 ans de la démolition de notre ancien restaurant et l’installation du nouveau à l’intérieur de notre vieille maison de famille. Nous fêterons une réalisation qui ne doit pas avoir beaucoup d’équivalent : la suppression d’un bâtiment commercial à très forte rentabilité au profit d’un but unique : la mise en valeur du patrimoine historique de notre village. Une épreuve financière invraisemblable au service d’un résultat incontestable et sans aucune aide notoire. Un long et énorme sacrifice financier de 20 ans qui a transformé la perception du village ! Juste pour laisser une trace…
Le chantier
Septembre 1991. En moins de six mois un chantier exceptionnel allait être mené tambour battant, sous la coordination de l’architecte Pierre Lazzarini, par des entreprises locales performantes. Le pari était de taille. On allait abattre toutes les anciennes constructions, enfouir dans le sol, sous la terrasse et le jardin, l’infrastructure nécessaire au bon fonctionnement d’un restaurant. On allait surtout s’attaquer à la vénérable bâtisse ancestrale pour y intégrer les « nouvelles » salles à manger. Il était inconcevable de supprimer une verrue pour en créer une autre ou faire quelque chose de médiocre… Tout devait être sacrifié au but premier : la remise en valeur du vieux rempart d’Yvoire. Donc pas question d’ouvrir une quelconque brèche supplémentaire. Au contraire, et c’est dans tout le travail ce dont nous sommes le plus fiers, nous avons réduit la plupart des fenêtres créées depuis moins d’un siècle et la surface totale des ouvertures faites ou restaurées au cours des travaux, dans l’ensemble du bâtiment, est largement inférieure à ce qu’elle était auparavant.
Six mois, c’est très court pour mener à son terme un chantier de cette ampleur. Il fallait donc entrer de plain- pied dans la vieille maison : on y entrera donc par l’intérieur en abattant deux murs dont nous allions récupérer les pierres, les encadrements de portes en molasse, et même la poussière de chaux afin de tout remonter « à l’ancienne ». Si les matériaux utilisés n’étaient pas tous dans la maison, à l’origine, ils sont par contre tous d’époque. Les lieux constituaient une sorte d’angle dans le rempart et l’on pouvait, depuis l’intérieur, surveiller le lac à l’est et les terres au sud. L’épaisseur du rempart, construit entre 1306 et 1310, est impressionnante ; deux mètres au rez de chaussée et près de trois mètres au sous sol.
L’accès à la tour, démolie au siècle dernier, qui surmontait la porte de Rovorée est visible à l’intérieur de la maison à hauteur de la meurtrière du dernier étage. On prêtera une attention toute particulière aux sols des deux salles de restaurant constitués de carreaux anciens récupérés (XVe siècle pour les plus vieux), à la poutraison monumentale (XIVe – XVIIe siècle) et à l’escalier en pierre qui monte au premier étage (XVIe siècle). La cheminée de la salle à manger du haut a été retrouvée, emmurée dans la maison et n’avait pas servi depuis plus de deux siècles. On appréciera l’importance de la fondation du rempart au sous-sol et la beauté des murs des anciennes caves. Vous êtes dans une maison qui a 700 ans.
Jean-Claude Fert
La patente de l’Auberge de la Porte, datée de 1557